Vers de nouveaux Horizons

Les prairies des semi-hommes étaient bien plus merveilleuses que ce que Wilfrid avait pu imaginer. Parmi les lieux qui lui avaient étés donnés de voir, il était bel en bien dans l'endroit le plus reposant qu'il ai connu. La nature n'avait pas été altérée par l'action des êtres humains, et s'était épanoui à son aise. C'était un festival de couleurs qui s'offrait aux voyageurs, entre le ciel d'un bleu clément, l'herbe verte respirant la fertilité, et des fleurs de toutes espèces. Les habitants de ces terres vivaient en harmonie avec cet environnement, et exploitaient la terre sans l'agresser. Ils étaient isolés de l'extérieur, et n'avaient donc jamais à se soucier des problèmes politiques. Et aucun bandit ne viendrait s'aventurer dans de tels lieux, tant la vie sans extravagance des habitants ne respirait pas la richesse. Les semi-hommes vivaient simplement, sans superflu. Pas étonnant qu'ils soient appelés « les gens les plus heureux du monde », vu qu'il n'avait jamais de soucier, et qu'ils savaient se contenter de ce qu'ils avaient, et n'était-ce pas là le secret du bonheur ? [HRP : amis lecteurs du vicaire savoyard, bonjour !] Loin des tracas des grandes gens, ils vivaient paisiblement, cultivaient leurs champs et profitaient de chacune de leurs journées.

Un soleil bien chaleureux frappait régulièrement, entre deux nuages, le visage des voyageurs. Le vent slalomait entre les arbres, et faisait voler les pétales des fleurs. Ces lieux respiraient la sérénité. Le mélange de parfums des fleurs venaient réveiller les sens des voyageurs, ils étaient enivrés par ce spectacle permanent. Aucune terre, hormis peut-être celles des elfes et des fées, ne devait arriver à un tel niveau d'harmonie. Wilfrid était presque hypnotisé, et aurait presque souhaiter être un vampire pour pouvoir profiter du décor comme Chiana le faisait. La fragile enfant se sentait pousser des ailes, et ne semblait plus se faire aucun soucis à propos de ses pouvoirs. Elle était plus qu'impatiente de rencontrer l'Impératrice, pour voir sa mère. A chaque fois que cette pensée la traversait, elle accélérait le rythme, au pied de littéralement scotchés sur place ses amis. Et elle était condamnée à attendre que les autres la rejoignent.

Elle se déplaçait pieds nus, et profiter de la sensation unique de l'herbe sur les pieds. Le vent venait chatouiller son visage et s'amusait avec ses cheveux, mais elle ne se laissait jamais faire, et rattrapait le vent presque aussitôt. Mais tous ses efforts finirent par réveiller son appétit vorace, et dans l'optique d'un festin, elle se mit à chasser. Elles fient de bien belles prises, quatre beaux lapins et un pauvre daim qui avait eu la malchance de la croiser. Les soucis de la jeune fille semblaient si loin derrière elle, qu'on aurait presque pu croire qu'elle les avait littéralement effacée de sa mémoire. De son côté, Wilfrid se posait toujours autant de questions. Il spéculait sur la Chiana qui naitra de la révélation de sa nature de vampire, il priait pour que l'homme qu'il était autrefois n'était pas un rustre ni un lâche, et que sa famille était bonne et bienveillante. Mais ses interrogations furent interrompues par la vampirette, qui amenait le déjeuner.

Stigand était chargé de cuisiner les lapins, car c'était sa spécialité. A chaque fois qu'il cuisinait le pauvre mammifère, il faisait l'unanimité auprès de ses amis. Il savait bien l'assaisonner, et avait durant les deux précédentes journées, su cerné les préférences de chacun. Il préparait pour chacun un plat rien qu'à lui, mais s'amusait à modifier deux ou trois ingrédients, pour varier les plaisirs et pour voir ce qui plait le mieux à ses amis. Il gagnait à chaque fois en rapidité dans la préparation des plats, ce qui n'était pas pour déplaire à la petite Chiana, qui n'était de tout façon pas patiente du tout. Wilfrid écoutait Salahadîn attentivement. Le semi-elfe ne cachait pas sa hâte d'arriver à un petit village, non loin d'ici. Il semblait optimiste sur l'arrivée prochaine à Industria Civitas. L'amnésique s'imagina qu'ils étaient bien plus proches de la ville que ce qu'il s'imaginait. Il faut dire que le rythme imposé par Chiana et la rapidité des montures leur faisaient gagnés un temps précieux.

Wilfrid servit à chacun sa part du repas. Chacun purent déguster leur viande bien assaisonnée tout en profitait du calme du paysage. Une brise légère semblait toujours vouloir en découdre avec Chiana, et en la voyant ainsi frustré, Stig se déplaça vers elle, de façon à ce que le vent ne la gêne plus. Puis, il fixa Salahadîn et lui demanda :

« Pouvez-vous nous raconter votre dernier passage dans le village dans lequel nous allons arriver dans la soirée ? Le bien que vous en dites m'intrigue au plus haut point. »

La description que Salahadîn fit du village des semi-hommes était idyllique. Le visage du semi-elfe reflétait tout le bonheur que les villageois lui avaient apportés à chaque fois qu'il était de passage. Il regardait tendrement sa pipe en contant son histoire. Cet objet dont il ne pouvait se séparer lui avait été offert par le doyen de ce village, et connaissant Salahadîn, s'il disait que l'herbe à pipe de là-bas était la meilleure, vu le nombre de voyages qu'il a pu faire, on ne pouvait que le croire sur parole. Selon ses dires, le village était l'incarnation même du bonheur et de la simplicité sur Chimeria. Il avait su gagné la confiance des habitants, et s'était fait respecter de tous. Une fois accepté totalement, Salahadîn avait pu partager la joie de vivre qui régnait au sein de cette petite population. A entendre ce récit, Wilfrid se sentit à son tour impatient d'aller voir par lui-même cet endroit qui semblait si merveilleux. Le maître resta imprécis en parlant des fusées de feu, mais nul doute qu'il s'agissait de ce qu'on appelait plus couramment les feux d'artifices. L'amnésique en avait vu qu'un, au village des nains qui l'ont recueillis, à l'occasion d'une fête. Ils n'avaient certes qu'une faible quantité de fusées, mais le spectacle était déjà somptueux. C'est comme si l'espace d'un instant, on pouvait rajouter quelques étoiles dans le ciel, une sorte de pouvoir divin d'un instant...

C'est avec une hâte sans nom que le groupe reprit la route, une fois les estomacs bien remplis. Chiana ne pouvait pas tenir en place. Sa curiosité maintenant légendaire était en émoi. Elle trépignait à l'idée de voir des fusées de feu, même si dans son esprit, elle s'imaginait quelque chose d'un peu différent, qui serait inutile de décrire ici. Elle harcelait le pauvre Salahadîn au sujet des fusées, et râlait bien fréquemment face aux refus du maître. Agacé, ce dernier eut l'intelligente idée de proposer à Chiana de faire une démonstration de ses talents de jongleuse, et il fit mouche. Chiana avait littéralement bondit de joie, c'était mise à sauter un peu partout, avant de reprendre sa place derrière le dos confortable de Stigand. Soudain, la vampire sentit une odeur de bois et de viande brulée. Elle disparut en un clin d'œil vers la colline, ce qui fit rirent aux éclats le reste du groupe. Décidément, elle avait un estomac avant d'avoir un cerveau... La nuage de fumée que l'on voyait au loin s'épaississait de plus en plus, mais les voyageurs ne s'inquiétèrent pas pour autant. Au vu de la façon dont Salahadîn avait décrit le hameau, il était difficile de croire à autre chose qu'à la préparation d'un festin. Mais le nuage devint de plus en plus noir, et ce fut une vision d'horreur qui s'offrit au groupe, une fois le sommet de la colline atteinte.

Le village avait été littéralement rasé. Tout était en feu. Tout n'était que désolation et douleur. On était là aux antipodes de la vision qu'avait donné Salahadîn des lieux. Était-ce bien le même village ? Au vu de la hâte que prit le maître à rejoindre le village, et à l'inquiétude qui s'était imprimé sur son visage, nul doute qu'il s'agissait bien là du village tant attendu, ce qui ne fit qu'accentuer l'effroi au sein du groupe. L'horreur de la scène atteint son paroxysme une fois l'autre bout du village atteint. Des corps de pauvres semi-hommes avaient étés empalés ici et là, tandis que d'autres avaient étés pendus haut et court. Un carnage sans nom. Wilfrid vit Chiana s'immobiliser, tandis qu'elle tenait une poupée. Il ne manquerait plus qu'elle se transforme. L'amnésique accourut près d'elle, lui arracha la poupée, et la prit fermement dans ses bras, collant ainsi la tête de la jeune fille contre sa poitrine, et lui caressant les cheveux de sa main, puis il lui baisa le front.

« Ce n'est rien Chiana... Ne pense à rien et ne regarde plus ce triste spectacle... Ne laisse pas le passé ressurgir s'il te plait... » articula-t-il difficilement, la voix aussi troublée et opaque que le nuage de fumées qui s'étendait au dessus de leur tête.

Il se tourna vers Salahadîn, qui était à genoux, face aux cadavres. Il fixait le sol. Il est inutile d'essayer de décrire l'expression de son visage et la peine dans son regard, tellement l'horreur et le désarroi de la situation l'avait affecté. Wilfrid fit alors appel à ses talents de pisteurs, et regarda partout autour de lui. Il y avait des traces un peu partout, dans toutes les directions, témoignant de la panique qui avait régné ici, elles étaient toutes emmêlés les unes sur les autres, impossible de dire s'il s'agissait d'empreintes de semi-hommes ou de bandits. Néanmoins, la fumée n'était visible que depuis peu. Si le village avait été attaqué plus tôt que cela dans la journée, ils l'auraient aperçus depuis plus longtemps. L'attaque était plus récente que ce qu'ils devaient s'imaginer. L'attention du pisteur se tourna vers quelques empreintes qu'il apercevait de loin, qui s'éloignait du village. Il ne voyait pas d'ici quel genre de personnes avaient pu les faire, mais c'était là une piste possible de la fuite des survivants, et de la direction qu'avait pris les opposants. Il resta à regarder de loin les empreintes, il se refusait à lâcher Chiana, de peur qu'elle perde le contrôle. Et vu l'état psychologique dans lequel Salahadîn avait sombré, nul doute qu'il aurait bien du mal à contenir une nouvelle fois le vampire de Chiana, si jamais elle se manifestait.

« Ressaisissez-vous, Salahadîn ! » cria Wilfrid. « Cet événement atroce qui a eu lieu ici est tout récent, et s'il y a des survivants, nous ne pouvons pas rester à nous lamenter. Je vois des empreintes qui vont vers l'extérieur du village, nous devrions aller voir. Il y a peut-être des vies à sauver. »

Il se tourna alors à nouveau vers sa jeune amie.

« Ne cède pas Chiana ! On a besoin de ton aide. Garde la tête froide... » Il la serra plus fort. « On a besoin de toi... »

Chiana ne réagit pas de suite quand Wilfried lui arracha la poupée des mains. Tsahid avait posé une main sur l’épaule de son maître…Il craignait sa réaction…

Chiana se laissa cajolée…Elle ne comprenait pas ces images qui se chamboulaient dans sa tête…Elle voyait des visages qui lui étaient inconnu, d’autres qu’elle connaissait mais dont elle aurait voulu ne plus se souvenir…et surtout…celui de sa mère. Elle la protégeait…Elle les avait cachées elle et sa sœur. Pour qu’au final elle soit donnée en pâture à un monstre qu’elle revoyait à présent très bien…Elle se souvenait…Elle prit sa tête dans ses mains et poussa un cri terrible :

« - Non !! Chiana ne veut pas se souvenir ! Chiana a trop mal quand elle se souvient ! Méchante Chiana ! ».

La voix de son ami lui parvint à ses oreilles, elle fermait les yeux cherchant à s’empêcher à devenir « méchante » comme elle disait. Soudain…il y eut un silence. Les paroles de Stigand avaient eut un drôle d’effet sur Salahadîn. Ce dernier s’était relevé. Il s’approcha de Chiana et fit doucement :

« - Il faudra bien qu’un jour tu te souviennes…Mais pas aujourd’hui… «

Sur ces paroles, il lui pinca le nez et l’obligea à boire le contenu d’une petite fiole. L’effet fut foudroyant, elle tomba dans un profond sommeil, Wilfried du la porter totalement. Salahadîn monta en selle et s’exclama alors :

« - En selle. Wilfried tu prends Chiana avec toi et ne t’inquiète pas pour elle…c’est pour son bien… »

Puis il dirigea sa monture vers les traces des fuyards…Il les observa longuement…et regarda les morts…il poussa un long soupire :

« - Nous ne pouvons pas leur donner une sépulture…Et à ce que je vois…il n’y a pas de survivants…adulte…où sont les enfants ? »

La voix de Tsahid qui s’était éloigné se fit entendre alors :

« - Ici… »

Le spectacle fut encore plus atroce…Les enfants avaient été dévorés…lacérés, déchiquetés…dépecés…mis en pièce…Les yeux de Salahadîn étaient glacials, sans aucune émotion…Il descendit de sa monture…et s’approcha d’un enfant un peu à l’écart…ses grands yeux étaient encore ouvert…comme s’il avait regardé la mort en face…D’un geste le Semi Elfe les lui ferma…puis se relava non sans inspecter les lieux…il y avait des traces de pas…ou plutôt de pattes…et cette manière de déchiqueter…

Il remonta en selle et fit à l’attention de Wilfried :

« - Il y avait un lycan avec les agresseurs…Et…il n’y a aucun survivants…Les traces sont donc bien celles des criminels…et parmi eux…il y a un lycan…Et ces traces vont vers Industria Civitas…Et si j’en juge par ces traces là, il en désigna des qui semblaient plus enfoncées dans la terre meuble et plus petites que les autres, il n’y a pas que des humains parmi les assassins…mais aussi des Nains… »

Sans dire un mot de plus il lança sa monture au galop…Il filait comme le vent, les autres le suivirent…Tsahid semblait inquiet…il regardait son maître avec tristesse et anxiété, il redoutait quelque chose…mais quoi…

Ils chevauchèrent jusqu’à la nuit tombée. Ils firent une halte…mais Salahadîn avait l’intention de reprendre la route même malgré la nuit…Il pouvait y voir comme en plein jour et les chevaux également…ils suivront, même si leurs cavaliers ne sont pas nyctalopes. Le Semi Elfe s’était isolé. Il fixait la nuit…assis sur un rocher…refusant de s’alimenter…il tenait dans ses main la poupée que Chiana avait ramassé…Il devait sans aucun doute connaître la fillette à qui elle appartenait…

Tsahid activa le feu et jetait parfois des regards vers son mentor…il fit à voix basse :

« - Ca va mal finir…Lui qui avait renoncé à la violence depuis la guerre et la disparition de son propre maître… »

La Guerre ? Salahadîn étaient donc plus vieux qu’il n’y paraissait. Bien qu’il soit un Semi Elfe, il avait donc hérité d’une bonne partie elfique…

Salahadîn esquissa un faible sourire face aux propos de son jeune ami…Oui…il avait renoncé à la violence voilà bien longtemps. Il avait laissé derrière lui la guère et son épée…sa voix était redevenue d’une douceur incroyable…comme à leur première rencontre…L’Elfe avait repris le dessus sur l’Homme…

« - Oui…ils n’auraient pas souhaité que je rende justice dans le sang…Mais il va de soit que ces meurtriers seront châtiés…Quant à ce lycan…il n’y a pas de trace de pattes de loup sur les traces que nous suivons…il a donc la capacité de redevenir humain. Il faudra donc te méfier de lui si nous le retrouvons et que tu souhaite l’affronter… »

Il dédaigna la nourriture…et baissa la tête…des gosses larmes perlèrent à ses yeux…Il pleurait en silence serrant la petite poupée dans sa main…Puis il essuya ses yeux de sa manche et ouvrit la main pour montrer la petite poupée à Wilfried :

« - La petite fille à qui appartenait ce jouet s’appelait Rosie…Elle était déjà très jolie comme sa maman…elle était le soleil, la joie dans la maison de sa famille. Son père cédait à ses moindres désirs…et moi aussi…Je lui avait fabriqué cette petite poupée sur sa demande…Elle avait dit que j’étais un magicien…pauvre petite…Faut-il être cruel pour tuer des femmes, des enfants et des vieillards…c’est bien digne de ces maudits dirigeants qui gouvernent les Nains et les Hommes…Ho le Roi Nain n’est pas un mauvais bougre…mais son conseiller le plus proche…celui-là…il s’est acoquiné à Terendul…et…mais pourquoi des Semi-Hommes…Sommes-nous donc revenus en ces temps maudits de la Grande Guerre… »

La main de Tsahid s’était posée sur son épaule…Le maître souriait à son élève...Ce dernier somma alors Salahadîn :

« - Il faut manger seigneur…Sans quoi vous ne tiendrez pas longtemps à ce train là…et nous n’arriverons pas à temps à la cité des Hommes…il faut parler de tout ceci à l’Impératrice…Demander une audience à Terendul, Grand Dirigeant des Homme serait pure folie s’il a orchestré ce massacre… »

Salahadîn soupira…et acquiesça…Il se saisit donc de la nourriture que lui tendait Wilfried et mangea sans grande conviction. La nourriture était fade…et ce malgré toutes les bonnes choses que Wilfried avait pu mettre dedans…Mais cela remplissait son ventre vide, et lui apportait la force nécessaire…Oui…il vengerait ses amis…mais il utiliserait la ruse et la patience pour se faire…

« - Merci jeunes gens…Encore un peu et j’allais faillir à mon serment de renoncer à mon épée…Je la conserve précieusement…C’est un souvenir…mais jamais plus elle ne fut dégainée…Et que cela reste ainsi est préférable…La rage et la colère risqueraient de me perdre…et je tuerai à mon tour…et je ne veux plus…Depuis ce jour… »

Mais il ne dit plus rien. Il se leva et rangea la poupée dans la sacoche qu’il portait en bandoulière sous son manteau…

« - Il faut repartir. Avec de la chance nous atteindrons la cité des Hommes…bien plus tôt que prévus… »

Il aida ses compagnons à ranger et vérifia que Chiana allait bien malgré son sommeil…puis ils se remirent en selle…décidément il était décidé…

« - Nous trouverons une auberge d’ici deux à trois heures…Nous y passerons le restant de la nuit…Et nous repartirons…En route ! »

Tsahid chevauchait aux côtés de Wilfried…le Semi Elfe était plus en avant. Il le remercia alors :

« - Je te suis reconnaissant pour tes paroles de tout à l’heure…l’horreur dont il a été témoin lui a fait perdre la raison momentanément…Il a tout perdu voila fort longtemps à cause de la guerre…et il est devenu quelque peu...fou…et dans sa démence…il a accomplis l’irréparable en tuant…un être cher…il a fallu toute l’amitié d’un seigneur Elfe pour lui rendre la raison…et lui faire jurer de ne plus jamais toucher à son arme… »

Tsahid regardait Wilfried avec insistance…il savait que le jeune homme comprenait la gravité de la chose…et pourquoi Tsahid lui était reconnaissant…

Wilfrid se sentit aussitôt rassurer après que Salahadîn ai prononcé quelques mots. Il avait réussi à raisonner le semi-elfe. Ce dernier se remit à parler avec sa voix douce de d'habitude. Sa colère était justifiable, mais il ne fallait pas lui céder, sous peine de devenir tout aussi méprisable que les assassins. Il ne devait pas s'abaisser à ce niveau là, il y avait toujours un autre moyen. Le maître informa l'amnésique que le lycan qui menait la bande pouvait devenir humain. Cette nouvelle inquiéta le jeune homme, car un tel être est bien plus dangereux qu'un lycan ordinaire, car il réfléchissait comme un humain, et non comme un animal. C'était un adversaire de valeur, et en vue d'un éventuel affrontement avec lui, il devait devenir plus fort. Il voulait retirer ce poids là à Salahadîn, qu'il admirait beaucoup, il n'avait pas à renoncer à son engagement.

Il affronterait le lycan si l'occasion se présentait. Même si l'idée d'un combat ne plaisait pas à Wilfrid, car il osait penser qu'il y avait un peu de raison même dans le pire des criminels, cet acte là était tout simplement impardonnable, et dans ces moments là, il faut savoir prendre les armes pour changer les choses. Salahadîn raconta alors en sanglotant l'histoire de la peluche qu'il tenait. La pauvre enfant à qui appartenait cette peluche s'appelait Rosie, c'était un bien jolie nom. Stig sentit que le maître s'était tout particulièrement attaché à elle. Puis, il parla de Terendul, le grand dirigeant des humains, et sembla évoquer un lien entre l'attaque du village et cet homme. Comment un homme ayant déjà un tel statut social pouvait-il souhaiter plus de pouvoirs, alors qu'il était déjà au sommet de sa hiérarchie ? S'il était responsable de cet événement, il devrait être démis de ses fonctions aussitôt. Un grand dirigeant devrait être bien plus tolérant et bienveillant que cela... Et dire que Wilfrid devait rencontrer ce monstre avant de tomber de cette maudite falaise. Il se demanda alors quel genre de dirigeant il ferait, s'il devait un jour accéder à une telle fonction, il se mit à faire la même réflexion sur son ancien lui. Peut-être était-il quelqu'un d'éclairer et ayant le sens des responsabilités par le passé. Mais là, tout n'était que spéculation. Il était idiot de s'imaginer de milles façons quel genre de personne il était avant, il le saurait bien assez tôt.

Wilfrid fut agréablement surpris de voir Salahadîn céder à sa demande. Même s'il n'avait pas faim, l'amnésique était rassuré de le voir manger, même si sa n'avait pas l'air de lui faire très plaisir au niveau gustatif. Mais cette nourriture remis son corps en marche, et il tiendrait, jusqu'à l'heure de la vengeance. Elle se mange froid, et peut être dégusté, sans pour autant être sadique. Il se leva, aida à ranger les affaires, et s'assura que Chiana dormait bien. Elle semblait rêver paisiblement, elle était bien loin des tourments de la journée. Il était temps de repartir, la cité des hommes était de plus en plus proche. Salahadîn indiqua qu'une auberge n'était pas très loin, à quelques heures de là. Le groupe reprit la route. Dans cette nuit noire, Wilfrid ne voyait pas grand chose. La Lune était bien souvent masqué par les nuages. Le jeune homme ne pouvait que voir quelques ombres s'agiter, mais rien de bien distinct, tant que la Lune était masqué. Tsahid et sa monture, du moins leurs silhouettes étaient à sa hauteur, et le marchand remercia le jeune homme d'avoir su raisonner son maître. Mais les quelques paroles qui suivirent réveillèrent la curiosité de Wilfrid, le semi-elfe semblait avoir un lourd passé derrière lui, notamment un excès de folie ayant soldé sur l'assassinat d'un être cher. Comment un homme aussi respectable et admirable que lui avait-il pu sombrer dans la folie, ne serait-ce qu'un instant, au point de commettre l'irréparable ?

« Désolé, ce que je m'apprête à vous demander est très indiscret, mais j'aimerai en savoir plus sur Salahadîn. Je ne pourrais probablement pas le comprendre, mais j'aimerai connaître son histoire, et ce qui l'a amené à renoncer aux armes. Il a évoqué la Grande Guerre, jusqu'à quand remonte-t-elle ? Il semble ne pas porter les dirigeants des hommes et des nains dans son cour. J'imagine que cette haine envers eux est lié à son passé... »

Wilfrid écouta attentivement le récit de Tsahid. Il expliqua point par point la triste histoire de Salahadîn. Il connaissait certes l'histoire avec les Grands Dragons, que Melni avait pris soin de lui enseigner, et il devait probablement déjà la connaître avant son amnésie. Mais Salahadîn semblait avoir vécu bien des épreuves dès sa naissance. Sa pauvre mère avait été tuée, et son père l'avait fait élevé parmi les elfes. Mais la disparition de son maître avait provoqué un profond traumatisme, au point qu'il avait assassiné... Sa propre fille. Sa chair, son sang. Le sang de Wilfrid ne fit qu'un tour en apprenant cette nouvelle. Comme quoi, avant de devenir quelqu'un d'aussi respectable et éclairé, il avait du traverser bien des épreuves.

Il comprenait maintenant pourquoi il ne voulait plus toucher une arme. Il avait peur de blesser à nouveau quelqu'un... Mais pour autant, un jour ou l'autre, il faudra bien qu'il reprenne les armes. Le maître de Salahadîn était quelqu'un d'extrêmement important, il aurait du devenir le grand dirigeant des elfes. Pas étonnant que le semi-elfe était devenu un individu aussi savant et intelligent. Il avait pris une place très importante dans le cœur de Salahadîn, bien plus importante que celle de son père visiblement. Son goût pour les voyages devait probablement venir de son envie de revoir le Disparu. Avec un surnom pareil, cela ne devait pas être évident du tout de le trouver.

Wilfrid avait une bien bel image de Salahadîn. C'était pour lui quelqu'un de très sage, de très intelligent. Il était respectable et éclairé, sa nature elfique le rendait très à l'écoute des choses. Ses conseils étaient toujours avisés, et il prenait toujours les meilleurs décisions possibles. Ses nombreux voyages lui avaient beaucoup appris, autant sur la nature de chaque race que sur les personnalités des autres. Il semblait pouvoir lire dans les pensées des autres d'un regard, deviner leurs pensées. Son côté elfique lui avait donner la longévité nécessaire pour acquérir beaucoup de connaissances, et cela dans des domaines diverses et variés.

Hélas, pour lui, jamais il ne vivrait pas assez longtemps pour expier son pêché. Pourtant, dans sa grande bonté, il avait apporter du bonheur aux enfants du village des semi-hommes. Notamment à cette petite fille, qu'il devait quelque part considérer comme sa propre fille, et qu'il aurait souhaiter voir grandir. Mais le sort en avait décidé autrement, et jamais il ne la verrait devenir une jeune femme. Pauvre homme, pourquoi le destin continuait ainsi à le tourmenter ? Wilfrid chercha un moyen de le convaincre qu'il remboursait sa dette chaque jour de son existence, mais comment expliquer cela à quelqu'un qui était si profondément blesser dans son âme...

Le groupe arriva enfin à l'auberge. Wilfrid avait réfléchit tout du long. Était-il capable de sombrer à nouveau dans la folie ? Le comportement qu'il avait eu plus tôt dans la journée laissait pensé que oui. Son âme n'était pas en paix, et avec le massacre de ses amis semi-hommes, et surtout celui de cette fillette, il avait aspiré à la vengeance. Même s'il avait su le raisonner, il pouvait replonger. Pour empêcher cela, il irait parler à Salahadîn avant d'aller dormir. Le palefrenier vint s'occuper des montures, qui avaient besoin d'un repos bien mérité, après avoir galoper pendant plusieurs heures. Stig irait dormir avec Tsahid, tandis que le maître veillerai sur Chiana... Pouvait-on laisser le semi-elfe surveiller la vampirette ? Oui, sans aucun doute, mais pas avant d'en avoir toucher un mot avec lui. Il observait calmement la jeune fille, tout en fumant sa pipe. A quoi pouvait-il bien penser ? Que lui inspirait-il la vision de la petite Chiana, prise dans les bras de Morphée ? Y voyait-il sa fille ? Non, enfin, Wilfrid n'y pensa pas un seul instant... Ce dernier installait confortablement Chiana dans la chambre, et prenait soin de bien la border. Salahadîn dit quelques mots à Wilfrid. Ce dernier sentit toute cette tristesse qui décantait lentement en cet homme respectable, accablé par le remord.

« Salahadîn, mon ami, vous devez vous débarrasser de vos fantômes. J'ai totalement confiance en vous, je vous considère presque comme un père, alors je ne m'inquièterai absolument pas pour Chiana cette nuit. Vous êtes quelqu'un de bienveillant, et par votre gentillesse de tous les jours, vous rachetez petit à petit vos actes. Vous êtes devenu quelqu'un de sage, par vos voyages et votre éducation. Vous avez le droit d'avoir vos moments de faiblesse, mais restez fidèle à vos principes, et vous ne tomberez jamais à nouveau dans la folie. Un jour ou l'autre, vous devrez reprendre les armes, pour protéger les êtres qui vous sont chers, ainsi que vos valeurs. Vous avez peur de votre lame, avant d'avoir peur de celle de vos ennemis, c'est pour cela que vous êtes fort. Alors n'ayez plus peur, et ne vous tourmentez plus ainsi. Je suis sur qu'un jour, vous finirez par rencontrer votre maître, et ce jour là, il saura vous expliquer bien mieux que moi que vous avez déjà racheté votre folie d'un temps. »

Il se leva, et posa alors amicalement sa main sur l'épaule de Salahadîn.

« Reposez-vous bien, bonne nuit... »

Wilfrid avait tenté bien que mal de remontrer le moral de son ami, et il tenta d'utiliser les meilleurs paroles possibles pour y arriver. Il comprenait très bien la douleur qu'apportait la perte d'êtres chers, il la connaissait que trop bien. Il l'avait expérimenté bien récemment, en apprenant la mort de la famille. Certes, il ne les connaissait pas, car il les avait oublié, mais la peine était identique. En revanche, il ne pouvait consoler Salahadîn sur le fait qu'il ai tué sa propre fille. Il savait que du point de vue du semi-elfe, aucun acte ne pouvait réparer son erreur, et Wilfrid le savait. On peut pas ressusciter les morts ni changer le passé, et cela était mieux ainsi, car qui sait combien de fous peuplent ces terres, et combien souhaiteraient ressusciter un être malfaisant, ou changer le cours de s choses en leur faveur ? Il faut assumer nos actes. Culpabiliser n'est pas un mal et nous permet de devenir d'avantage bon et vertueux. La folie, un fois qu'on lui cédait, ne faisait qu'empirer les choses, et sous son joug, on pouvait commettre des choses bien terribles que la conscience et la morale ne nous autoriserait pas à faire en temps normal. Le semi-elfe en était la preuve vivante. Même si cela pouvait paraître audacieux de la part de l'amnésique de donner une leçon de moral à quelqu'un d'aussi intelligent que Salahadîn, ce dernier avait effectivement besoin de quelques rappels. A aller trop loin, on en oublierai presque les bases. Le jeune homme aiderait celui qu'il considère comme un maître et un père à trouver son maître, il en fit le serment sur son âme. Wilfrid entendit les quelques murmures que prononça le semi-elfe. C'était véridique, Wilfrid pouvait plonger lui aussi dans la folie.

Qui sait comment il réagirait, une fois face à ses pires ennemis, les lycans. Lui-même ignorait s'il saurait canaliser sa haine ou non. Il ferait le maximum pour le faire, mais il serait bien prétentieux de sa part de penser qu'il y arriverait jusqu'à la fin de sa vie. Heureusement, il avait des êtres chers qui sauraient le remettre dans le droit chemin. Et surtout, il y avait Chiana. Il se sentait presque prêt à se sacrifier pour elle, si sa pouvait la sauver d'une mort atroce. Mine de rien, il s'était beaucoup attaché à elle. Bien que leur rencontre était le fruit du hasard, la pureté et l'innocence de l'âme de la jeune fille l'avait touché. Qui pouvait résister à cette petite frimousse, mi-humaine mi-chat, avec un esprit de gosse dans un corps d'adulte, avec deux perles de lunes en guise d'œils ? Pas grand monde. Malgré son comportement énigmatique, son passé bien obscur et sa façon de s'habiller parfois douteuse, elle était très charmante, et son rire cristallin était communicatif. N'importe qui rirait en la voyant faire une quelconque activité, que sa soit courir après un papillon ou jongler avec les torches comme elle savait si bien le faire ? Dans son triste destin, Wilfrid avait pu rencontré et s'attacher à ce petit rayon de soleil. Il la considérait comme une sœur, peut-être même plus. Il n'en savait trop rien.

Comment faire la distinction entre amour et Amour ? Il l'aimait, mais l'Aimait-il ? Il est inutile de chercher une réponse à ces questions maintenant. Il la protégerait, coûte que coûte, l'essentiel était là. Pour elle, il ferait tout pour ne pas sombrer dans la folie, même si sa haine pour les lycans était bien réelle. Après tout, ils lui avaient volés sa famille, fait massacré les semi-hommes et la famille de Chiana. Il affronterait ceux qui provoquent douleur et peine chez les autres, car ils sont une partie de la peste de ce monde. En revanche, il tolérerait ceux qui essayent de vivre comme des êtres ordinaires. Il ignorait tout de l'implication de la noblesse humaine dans ces meurtres, mais Salahadîn avait laissé sous entendre que le cerveau de ces actes était Terendul, le grand dirigeant des humains, lui-même... Un homme aussi puissant pouvait-il vraiment s'abaisser à commanditer des massacres abominables comme celui des amis de Salahadîn ? Un homme aussi important est censé protéger son peuple, ainsi que ceux qui voyagent sur ses terres, et non pas chercher à en éliminer. Ses réflexions se précipitèrent dans la tête du jeune homme durant tout la nuit. Il fut évident pour lui qu'il ne pouvait tolérer qu'un roi agisse ainsi, mais il ne se volait pas d'illusions quant au fait qu'à son niveau, il ne pesait pas bien lourd dans la balance. Il verrait en temps et en heure ce qu'il pourrait bien faire, peut-être pouvait-il obtenir l'appui de l'Impératrice, ou du moins une intervention de sa part.

Le lendemain, après une nuit certes courte mais réparatrice, Wilfrid se leva pour rejoindre ses amis. Il entendit Salahadîn s'adresser à l'aubergiste. Il semblait vouloir recueillir des informations à propos d'éventuels passants, pour ne pas dire meurtriers. L'aubergiste se contenta de dire que parmi la bande, il y avait notamment des nains et une femme. Ils avaient mangés comme des ogres et bus jusqu'à plus soif. Chacun d'entre eux ornait un bijou représentant un ouroboros, c'est à dire un serpent qui se mord la queue, symbole d'immortalité et de recommencement, au même titre que le phénix. Et sur leurs vêtements, il y avait un étrange blason, symbolisant un amas de serpents, mêlés les uns aux autres. Wilfrid observa Salahadîn, visiblement il avait une idée de l'identité de ce groupe de guerriers, ou du moins, à qui ils pouvaient bien obéir. Après avoir payer l'honnête homme, il fit signe à ses amis qu'il était temps de partir. La route était encore longue, et l'Impératrice progressait dans les terres des hommes. Industria Civitas était encore loin, et les bandits avaient du prendre de l'avance. Wilfrid partit chercher Chiana, qui n'était pas vraiment réveillé. Le contenu de la fiole était décidément un bien puissant médicament. La pauvre fille ne devait pas de rendre compte qu'elle était dans une auberge, en revanche, elle semblait avoir reconnue son ami. Il l'a prit dans ses bras, et se dirigea vers la sortie. Le palefrenier avait pris bien soin des chevaux. Wilfrid installa Chiana sur son cheval, ou plutôt, sur le cheval préféré et personnel de Salahadîn. Et le groupe prit la route. Chiana arriva à s'endormir sur le dos de son ami. Elle avait fait passée ses bras autour de la taille de Stig, pour se tenir à lui. Et ce dernier tenait une de ses mains avec la sienne, pour la rattraper au cas où elle glisserait. Wilfrid se tourna vers le maître, qui galopait devant lui.

« Dites-moi Salahadîn, pouvez-vous nous faire part de vos hypothèses et de vos certitudes quant aux hommes qui sont passés à l'auberge avant nous ? Et pensez-vous sincèrement que le grand dirigeant est lui-même lié à ces évènements ? Quel genre d'homme est-il réellement ? J'avoue ne rien savoir de lui, hormis son nom... »

Stigand avait entendu les propos de l'aubergiste, à propos des guerriers qui étaient passés avant eux. Et ce que raconta l'honnête homme avait réveillé la curiosité du jeune garçon. Et Salahadîn avait quelques éléments de réponses. Ce dernier lui parla du Culte des Ombres, un nom sinistre pour des desseins qui le sont pas moins. Il s'agissait d'une secte dédiée à la magie noire. Hormis la magie qui entourait Chiana lorsqu'elle se transformait, Wilfrid n'avait jamais pu voir de véritables sorts magiques. Il ne connaissait pas grand chose en sortilège, mais il savait très bien de réputation que la magie noire était terrible et dangereuse. Il apprit également de la bouche du maître de ce culte n'était autre que Xorax, le grand intendant du roi nain, et que ce dernier s'était associé au fameux Terendul. Ces deux êtres étaient animés que par la haine et la soif de pouvoir. Ils étaient corrompus par le mal jusqu'au cou... A chaque mot qui sortait de la bouche de Salahadîn, Wilfrid méprisait un peu plus ces individus. Décidément les hautes sphères semblaient chargés de bien mauvais bougres. Le maître assista ensuite d'avantage sur le personnage de Terendul.

Salahadîn ne l'appréciait guère, et cela se faisait sentir rien qu'au timbre de sa voix. Malgré le fait que le grand dirigeant des hommes soit de base quelqu'un d'ambitieux et de cupide, il était, selon les dires du semi-elfe, manipulé par Xorax. Même s'il n'était qu'un pantin, il était déjà animé de mauvaises intentions, et Xorax profitait de ces prédispositions pour mieux le manipuler, tel un pantin dans les mains du marionnettiste. Malgré tout, Terendul avait eu des enfants, et à croire Salahadîn, ils étaient bien plus humains que leur père. Et c'est la perte d'un des enfants qui fut l'élément déclencheur qui permettait à Xorax de se servir du dirigeant des hommes. Qui sait à quel point le décès de son enfant l'avait affecté, et à quel point il était devenu manipulable. L'intendant du roi nain, à la tête de son culte, avait peut-être promis bien de choses impossibles à Terendul, pour le mettre à sa merci. La magie noire était lié aux forces obscures, et était source de biens d'illusions. A entendre le semi-elfe, les ancêtres de Xorax n'étaient pas mieux que lui. A croire que cette famille était source de problèmes, et cela depuis le temps des anciens dragons...

Salahadîn apprit à Wilfrid que son maître avait du fuir à cause de Terendul et Xorax, pour protéger les elfes. Si effectivement les mauvaises pensées des ancêtres datant de l'époque où les dragons vivaient parmi les autres peuples dans Chimeria s'étaient transmises aux descendants, pas étonnant que le maître du semi-elfe sentit le besoin de fuir. La soif de pouvoir des hommes et des nains avait provoqué la Grande Guerre, et malgré les siècles passés, cette soif s'était transmise de générations en générations. Sahaladîn commença à se mettre en colère. La cupidité de Terendul avait fait tué un de ses fils, et fit disparaître le maître du semi-elfe, provoquant ainsi la folie de Salahadîn, la mort de sa fille... Xorax était l'étincelle qui avait mis le feu aux poudres, et par son ambition démesuré, il avait déclenché un engrenage de biens tristes évènements. Quand cela s'arrêtera-t-il ? Nul le saurait.

Le maître cherchait à savoir pourquoi diable ses amis semi-hommes avaient étés pris pour cible ? Dans leur petite bourgade, il ne devait rien avoir à cacher de toute façon, alors pourquoi s'en être pris à eux ? Cela était un mystère impossible à dissiper. Un silence s'installa, brisé quelques instants plus tard par Tsahid. Industria Civitas n'était plus très loin, à moins de deux jours à cheval. Si la chance leur souriait, ils arriveraient avant l'Impératrice et la Confrérie. Avec leur aide, ils allaient pouvoir résoudre le problème de Chiana, et peut être qu'ils pourraient aider Wilfrid vis-à-vis de sa mémoire, ou encore Salahadîn et les soucis des semi-hommes. Si le courroux de l'Impératrice pouvait s'abattre sur Xorax et Terendul, cela arrangerait bien des choses. Encore fallait-il prouver qu'ils étaient réellement responsables. Et même en coupant la tête du Culte, les membres resteraient probablement actifs, et d'autres personnes prendraient la relève.

Le groupe progressa rapidement. Wilfrid n'osa point poser d'avantage de questions. Il était inutile d'accabler d'avantage Salahadîn. Il avait déjà bien assez de soucis. Chiana quant à elle semblait toujours à moitié dans les vapes. Plus vite ils atteindraient Industria Civitas, plus ils mettaient de chances de leur côté pour changer les choses. Mais malgré la monotonie de la route, Wilfrid restait aux aguets. Après tout, ils allaient vite, peut être plus vite que les membres du Culte des Ombres, et s'ils allaient eux aussi à Industria Civitas, ils risquaient de les croiser. Et s'ils tombaient sur eux, qui sait comment cela se terminerait. Ils étaient nombreux, enragés, et il y avait un lycan parmi eux, tandis que le groupe de Stig n'était constitué que de quatre personnes, dont une mise hors d'état de combattre, à cause de la potion du semi-elfe. Il fallait éviter un affrontement direct, c'était bien trop risqué. Mais Wilfrid était prêt à défendre ses amis, si jamais la situation devait mal tourné.

Le groupe de Wilfrid s'était déplacé toute la journée, et lorsque la nuit tomba, ils arrivèrent dans un village assez grand. Cette petite bourgade semblait prospère et tranquille, et ne semblait pas ébranler par le passage du Culte des Ombres, qui avaient massacrés les semi-hommes il n'y a pas si longtemps. Ils étaient au village de Mixtum, un nom qui respirait la neutralité et la sérénité. Stig s'étonna du drôle d'accueil qu'on lui accorda. On le fouilla, et des hommes lui posèrent quantité de questions. La raison de cette prudence à l'égard des étrangers était la présence dans la région d'hommes en noir qui semaient la terreur, à savoir le bien nommé Culte des Ombres, mais aussi et surtout la présence de la Confrérie dans la ville. Cette nouvelle fut un électrochoc pour Wilfrid. La chance lui souriait enfin, ils avaient rattrapés l'Impératrice, et ils étaient dans la même ville ! Un bon nombre de soucis allaient être résolus. Chiana était encore droguée par la potion de Salahadîn, et n'avait sans doute pas percuter en apprenant la présence de l'Impératrice dans le village, et heureusement, qui sait dans quel état de surexcitation elle serait rentrée... Elle aurait pu traverser le village de part en part, à la recherche de la « Daaaaaaaaaaaaame » en criant « Maman » partout... Une vraie furie.

Les hommes en noir étaient partis, cela soulagea tout le groupe. Ils devront payer pour les actes infâmes, mais un autre jour. Pour l'heure, Wilfrid avait bien d'autres occupations. Il transporta Chiana sur son dos jusqu'à l'auberge qu'on lui avait indiqué. Salahadîn avait vraiment sorti les grands moyens, et la pauvre vampirette en était réduite à un état semi-éveillée, Wilfrid la tenait pas l'épaule pour qu'elle tienne debout tant bien que mal. Malgré la présence de la Confrérie, on lui avait garanti qu'il restait de la place pour les quatre voyageurs. Leur entrée dans l'établissement fut bien discrète, mais le semi-elfe souriait de voir les personnes qui étaient présentes. Il y avait cinq personnes, dont un nain, qui tentait tant bien que mal de faire boire de l'alcool à un elfe juste à côté de lui, scène pour le moins humoristique. A côté d'eux se tenaient un lutin, un corbeau et un vieil homme... Le regard de Wilfrid se posa sur le lutin, il ne se doutait pas un seul instant qu'il avait face à lui un roi... Salahadîn désigna un à un les personnes présentes à Stig, et quel ne fut pas son étonnement en apprenant l'importance de chacune de ces personnes dans leurs royaumes respectifs. Le lutin était le roi des farfadets, l'elfe un capitaine, le nain un prince héritier, et le vieil homme un des principaux conseillers et ami de l'Impératrice elle même. Le sang de Wilfrid ne fit qu'un tour. La présence de personnes aussi importantes l'intimidaient au plus haut point, il se sentait bien petit face à eux, même s'ils semblaient ne pas être de mauvais bougres.

La capitaine elfe, aussi étonnant que cela puisse paraître, vint vers Salahadîn et le désigna par Hyamendacil... Était-ce là la véritable identité du semi-elfe ? Wilfrid en conclut qu'il s'agissait de son nom elfique. Les retrouvailles des deux hommes étaient plus que chaleureuses. Ils discutèrent en langage elfique, et le pauvre Wilfrid ne pouvait malheureusement pas comprendre le sujet de la conversation, mais aux vues des rires et des sourires sincères qui s'affichaient sur chacun des visages, il en conclut qu'ils devaient discuter un peu du passé, et prendre des nouvelles de l'un et de l'autre, le tout accompagné de quelques anecdotes peu banales... Puis le maître se tourna vers Wilfrid et la pauvre Chiana, qui était toujours entre le monde des vivants et les bras de Morphée. Salahadîn présenta chacun des deux individus à Voronwë. Il se mit à parler en elfique juste après avoir présenter la jeune fille, les deux hommes froncèrent les sourcils. Avait-il dévoilé la nature de Chiana au capitaine ? C'était fort probable. Mais pas de quoi s'inquiéter, les amis de Salahadîn ne pouvaient être que des honnêtes hommes et des personnes respectables, à qui ont pouvaient faire confiance. Puis, Voronwë se présenta à Wilfrid, en posant chaleureusement sa main sur l'épaule du jeune homme. Malgré l'intimidation que procurait la présence de personnes aussi importantes dans leurs sociétés respectives, l'amnésique se sentit à l'aise aussitôt.

« Je m'appelle Wilfrid, mais mes amis m'appellent Stigand. C'est un honneur et un plaisir de faire votre rencontre. Les amis de Salahadîn sont aussi mes amis. »

Après avoir désigner Nicodémus, ce dernier se leva et vint à la rencontre des voyageurs. Wilfrid ne se doutait pas qu'il avait saisit l'intégralité de la conversation, y comprit la partie elfique. Le mage observait avec intention la jeune vampire et interrogea Salahadîn au sujet de cet état de santé. Ce dernier lui expliqua alors qu'il avait du donné une forte potion à la jeune fille, pour éviter qu'elle se transforme. Il faut dire que sans ce breuvage, Chiana se serait sans aucun doute transformer, et compte tenu de la situation, il y aurait pu avoir des morts. Nicodémus annonça alors que les quatre voyageurs seraient conviés à venir manger avec la Confrérie. Son regard se posa ensuite sur Wilfrid. Le pauvre garçon se sentait rapetissé à vue d'œil. L'homme qui se tenait face à lui était terriblement charismatique et respirait la sagesse. Stig voulait devenir ce genre de personnes, à la fois respectable et respecté, source de conseils et très savant. Mais il n'était pas un mage, loin de là. Il n'était qu'un petit amnésique qui était bien plus préoccupé par les problèmes de son amie et par sa mémoire, plutôt que par l'avenir de ce monde. Avant de rejoindre les chambres, afin de se reposer un peu avant le repas avec les hautes gens, Wilfrid s'adressa au capitaine et au mage.

« Je vous remercie infiniment de nous laisser partager le dîner avec nous. Sa sera avec un plaisir sans nom que nous vous rejoindrons. »

Les voyageurs montèrent alors à l'étage, et se dirigèrent vers leurs chambres. Salahadîn interloqua Wilfrid, au sujet du repas du soir. Face à des personnes aussi importantes, il fallait mieux qu'un petit amnésique ne se fasse pas trop remarqué.

« Ne vous inquiétez pas pour moi, vous êtes plus à même de parler de nos problèmes à l'Impératrice que nous même. Vous nous connaissez mieux que nous nous connaissons. Je vous fais confiance pour tenter de nous introduire à l'Impératrice. Néanmoins, je redoute surtout un emballement de la part de la petite... » dit-il, en désignant Chiana de la tête. « N'ayez crainte, à voir comment vous sembliez apprécier Voronwë, je n'ai pas à me soucier de quoi que ce soit. La Confrérie semble être composé de personnes éminentes, mais bien plus humaines que Terendul ou Xorax... »

Wilfrid accompagna Chiana dans sa chambre. La pauvre jeune fille s'effondra sur le lit. Le jeune homme souleva alors son amie pour l'installer confortablement, pour que son repos soit réparateur, et pour qu'elle ne se réveille pas casser de partout. Wilfrid alla poser ses affaires dans la chambre qui lui avait été désigné, puis revint dans celle de Chiana, et s'installa sur un fauteuil juste à côté, il attendrait avec elle le dîner. Il serait muet comme une carpe, et à moins que lui laisse la parole, il ne participerait pas à la conversation qui se suivrait à table. Ce qui l'inquiétait davantage, c'était l'éventuel comportement que Chiana pouvait avoir durant la soirée... Elle serait bien capable de se jeter au sens propre du terme sur l'Impératrice, et lui imploré d'invoquer sa mère sur le champ. Et qui sait comment le reste de la confrérie pourrait réagir face à cela... Wilfrid s'installerait si possible à côté de Chiana, pour l'empêcher de trop bouger... Le jeune homme commença à s'assoupir à son tour sur le fauteuil. Le trajet l'avait épuisé.

Ce fut le capitaine Voronwë qui vint chercher Chiana et Wilfrid. Ce dernier se réveilla presque en sursaut en entendant la porte de la chambre s'ouvrir, même s'il ne somnolait que légèrement. Il ne savait pas combien de temps il s'était passé, mais peu importe, les estomacs réclamaient un copieux repas. Chiana semblait refaire surface, la potion allait bientôt ne plus avoir aucun effet sur elle. En tout cas, ce breuvage avait eu le mérite de l'apprivoiser. Salahadîn vint à son tour, et conseilla Chiana de rester bien sage, elle acquiesça de la tête, mais Stig savait qu'il fallait qu'elle garde un œil sur elle durant le repas. Non seulement pour surveiller son langage, mais aussi ses manières. Morfale comme elle était, et en présence d'importantes personnes, elle ne devait se comporter comme l'ogresse qu'elle était d'habitude.

Une grande table avait déjà été dressé. Il y aurait plus de monde à cette table que Wilfrid ne l'avait imaginer. Le mage Nicodémus désigna à chacun sa place. Stig se retrouverait près de sa chère Chiana, mais il ignorait cependant qui viendrait s'installer près de lui. Toutes les personnes ici présentes s'étaient installés, et attendirent silencieusement l'arrivée de l'Impératrice. Wilfrid se demanda un instant si elle allait réellement venir, mais ce doute disparût à l'écoute d'un groupe de femmes en train de rire qui s'approchait. Le jeune homme comprit au raclement de gorge du mage que l'Impératrice faisait partie dudit groupe. Tout le monde se leva pour accueillir ces dames. Quel ne fut pas l'étonnement de Wilfrid devant la beauté de chacune des femmes qui entraient les unes après les autres dans l'auberge. Mais il ne sut exactement qui était l'Impératrice. Elles semblaient toutes de bonne famille. L'une des femmes attira tout particulièrement son intention, et il ne se doutait pas qu'il s'agissait de la célèbre Impératrice. Malgré son air sévère et sérieux, son visage et son allure respirait la douceur et le calme. Elle confirma son haut rang en s'asseyant en bout de table. Wilfrid comprit alors de qui il s'agissait réellement. C'était étrange, elle semblait être à peu de choses près de l'âge du jeune. Mais elle était de loin la plus belle des femmes ici présentes. Elle n'avait pas besoin de beaucoup d'artifices pour faire ressortir ses traits, son maquillage était léger et fait avec goût, et allait parfaitement avec les traits de son visage. Ces longs cheveux étaient très sombres, et contrastait nettement avec la couleur de son visage, ce qui ne faisait que ressortir la beauté naturelle de cette femme. Et surtout, son regard bleu océan était si profond, que le jeune homme pensa un instant qu'on pouvait s'y noyer... Une autre magnifique jeune femme s'installa près de Wilfrid, il était décidément très bien placé à cette table. Une belle fille aux cheveux blonds et aux yeux saphirs, très attirante et charmante au plus haut point. Son visage était très doux et elle respirait la gentillesse. Elle se présenta à Stigand. Il racla sa gorge avant de prendre la parole, de peur de parler de travers.

« Tout le plaisir est pour moi mademoiselle, c'est un grand privilège pour moi d'être assis à une telle table. » répondit-il chaleureusement en saluant Dora d'un sourire.

Néanmoins, elle se désigna comme la sœur du roi des farfadets et du corbeau... Il s'interrogea un instant. Si elle avait un tel lien de parenté avec le lutin, n'était-elle pas censée être une fée ? Pourtant, c'était un corps de belle jeune femme qu'il avait devant lui. C'était une famille haute en couleur qu'il avait face à lui. Mais passons, il devait y avoir une raison à tout cela, mais cela ne le concernait pas... Mais le fait qu'elle soit la sœur du roi imposait qu'elle soit une princesse. Il fallait mieux ne rien demander et ne pas paraître trop curieux. Wilfrid vit alors une autre femme s'installer à côté de Chiana, elle aussi d'une grande sensualité. Ce qui choqua le jeune homme, c'est le fait qu'elle soit si peu vêtu... Pourtant il ne faisait pas si chaud, surtout la nuit. Il eut une réponse à son interrogation juste après. L'espace d'un instant, il vit les canines de la jeune femme, qui étaient proéminentes par rapport aux autres dents. Il n'y avait pas de doute possible, elle était une vampire. Chiana n'était donc pas la seule jolie vampire ici présent... Une autre femme s'installa prêt de Lou cette fois, elle semblait plus discrète que les autres. Néanmoins, quelle bien belle assemblée. Wilfrid se sentit minuscule face à toutes ces personnes. C'était si intimidant qu'il sentit ses joues rosir. Il n'osa point poser davantage son regard sur l'Impératrice, mais presque aucun de ses gestes ne lui échappait, elle était la source de toute son intention. Elle était peut-être la clé d'un bon nombre de problèmes pour le jeune homme.

L'Impératrice semblait s'intéresser de près au petit couple de voyageurs, mais Wilfrid faisait comme s'il ne le remarquait pas. Elle s'intéressait surtout à Chiana. Avait-elle déjà deviner la nature de la jeune fille ? Il savait qu'elle avait d'étranges pouvoirs, mais il ne savait pas de quel type exactement. Mais Chiana remarqua à son tour l'Impératrice et interrogea Wilfrid. Ses petits yeux de chat s'étaient plonger dans ceux du jeune homme, et elle tirait sur sa manche en plus. Il était bien gêné. Dora semblait curieuse d'en savoir un peu plus sur l'histoire de Chiana. Il voulut répondre.

« Et bien Chiana, il s'agit de... » dit-il d'une voix gênée, mais il fut interrompu.

Chiana poussa un petit cri, quelqu'un était entré dans l'auberge, et l'inconnu semblait avoir eu la même réaction que Chiana. Ils se scrutèrent un instant. L'étranger était si habillé que ne pouvait voir ne serait-ce qu'une infime partie de son corps. Qu'avait-il donc à cacher ? A la grande surprise de Wilfrid, il faisait aussi parti de la Confrérie. Il semblait pourtant bien moins chaleureux que les autres membres. Avait-il sentit que la jeune fille était une vampire ? Pourtant Chiana n'avait pas réagit face à Sélène, alors qu'elles étaient toutes deux des vampires. Wilfrid eut la réponse aussitôt lorsque Lou se leva pour prendre la parole. Elle affirma que l'inconnu, qui répondait au nom de Wagnerr, qu'il était de la même espèce que la jeune fille. Décidément, la Confrérie était haute en couleur, et composé d'importantes personnes, mais venant aussi d'horizons bien curieux. Lou s'adressa directement à Wilfrid, en l'appelant par son nom complet. Il n'avait pourtant pas eu vent d'une quelconque conversation entre Salahadîn et l'Impératrice. Il y eut comme une cassure dans l'âme de Wilfrid. Ces gens ici présents semblaient mieux que le connaître que lui-même. Il se voyait presque comme un étranger. Il était amnésique, et son ancien lui était un parfait inconnu. Cela ne fit que l'écraser davantage devant le poids du rang social des autres personnes ici présentes. Il baissa les yeux. Comment diable l'Impératrice pouvait-elle en savoir autant ? Lisait-elle dans les esprits ? C'est pas bien votre Altesse, c'est une atteinte à la vie privée !... Hrem... Wilfrid se sentit comme un livre ouvert aux pages déchirées à la main... Il releva la tête et adressa un regard franc à l'Impératrice. Entendait-elle ses pensées ? Si oui, il ne pouvait rien lui cacher, et puis de toute façon, elle devait déjà tout savoir...

« C'est exact, votre Altesse. » répondit-il respectueusement. « Et à vrai dire, les soucies de mon amie sont la principale raison de ma présence ici. Mes propres problèmes sont d'une toute autre nature et ne nécessite pas que je vous importune avec cela. »

Il fit un sourire forcé, il ne pouvait sourire sincèrement devant le poids des rangs et par son complexe d'infériorité, et il baissa les yeux à nouveau. Il eut un profond soupir, et pris un morceau de pain. Il ne voulait pas déranger la Confrérie. Après tout, il n'était qu'un petit amnésique en quête de son identité perdue. L'atmosphère chaleureuse du départ qu'il l'avait mis en confiance avait soudainement disparu. Il se sentait totalement nu, mais pas humilié. Une sensation très dérangeante et perturbante. De temps à autre, il relevait la tête, toujours pour regarder l'Impératrice. Il n'avait pas besoin d'ouvrir la bouche pour se faire comprendre, si elle était dans sa tête. Il espérait que Chiana n'avait pas percuté aux paroles de l'Impératrice. Wilfrid posa sa main sur l'épaule de sa jeune amie. Il voulut lui baiser le front après les quelques mots qu'il lui adressait, mais il ne voulait pas attirer l'attention des convives, ni entendre de bien curieuses remarques.

« Ne t'inquiète pas Chiana, tout va bien. Tu peux manger à ta faim, à condition de le faire proprement. Et après, on s'occupera de toi et de ta maman, je te le promets. »

Tous les évènements avaient rendu Stigand mal à l’aise…chose qui n’échappa nullement à Dora et Sélène. La première observait Dora du coin de l’œil…elle avait l’air étrange cette demoiselle elle ressemblait à un…chat…

L’ex fée demanda gentiment à Wilfried :

« - Vous venez de loin ? »

Elle se voulait le plus polie du monde…Elle se dit soudainement que ce brave garçon avait du prendre peur quand elle avait dit qu’elle était la sœur du roi des Lutins et des Fées…elle repris donc :

« - Vous savez Wilfried…il ne faut pas penser que parce que nous sommes des hautes lignées nous vallons mieux que vous…Personnellement je m’en contrefiche d’être une princesse…Alors…hihihi appelez-moi Dora comme tout le monde »

Ben de mieux en mieux…pour fiche les gens mal à l’aise y’avait pas mieux…manquerait pu qu’elle lui demande de la tutoyer…pis quoi encore…passons^^…

Sélène quand à elle avait remarqué les yeux gourmands de Chiana qui se portaient sur un plat de l’autre côté de Sélène…Cette dernière le saisit et le lui tendis…Elle éclata d’un rire cristallin quand elle vit la vampirette se saisir de la moitié du contenu du plat et l’avaler en moins de temps qu’il n’en fau pour le dire…De quoi même Wilfried encore plus mal à l’aise…

Sélène fit alors à son entourage :

« - Elle a un solide appétit cette petite…La prochaine fois on la mettra à côté de notre seigneur Nain…je suis sûre qu’ils s’entendraient à merveille… »

Roran avait entendu qu’on parlait de lui. Il émergea de sa pinte de bière, la barbe pleine de mousse…L’alcool commençait à faire effet et il était d’humeur joyeuse…Il leva sa pinte et lança :

« - Quand l’appétit va…tout va ! »

Chacun leva son verre tandis que Sélène passait d’autres plat à Chiana qui engloutissait tout…Elle était l’amusement général. Bientôt un concours entre le Nain et la demoiselle fut déclenché. De quoi détendre l’atmosphère…Comme quoi on pouvait être un prince…et savoir rire aussi bien qu’un roturier ou un bouseux.

Le Nain mettait bien l’ambiance. Nul ne semblait perturbé de la manière de se comporté de Chiana, ou encore sa façon de parler…De quoi rassurer Stigand…

Lou ne quittait pas Chiana des yeux…quelques fois ses yeux se portaient sur Wilfried…oui mon ami…elle lisait dans tes pensées…et elle ferait tout pour te sortir de là…car toi aussi tu mérite de savoir qui tu es…pour que toi aussi tu puisses jouir de ton statut…et du rang qui t’incombe…

L’impératrice avait adopté une attitude nonchalante…l’un de ses bras sur le dossier de sa chaise, elle était assise de biais, un genou sur l’autre…son autre main passait sur son menton…un demi sourire aux lèvres…cette jeune fille chat l’intéressait au plus haut point…

Wilfrid était bien mal à l'aise, et pour cause, il ne jouissait d'aucun rang social particulier, et il était à table avec la grande Impératrice du monde de Chiméria, le roi des farfadets, le prince hériter des nains, et d'autres personnes éminentes... De quoi faire pâlir le pauvre amnésique. Et pour couronner le tout, il était assis entre Chiana, la vampire qu'il appréciait tellement, et Dora, sœur du roi des farfadets. Et elles étaient toutes deux de charmantes jeunes femmes, même si l'une d'elle était plutôt du genre ogresse, surtout à table... Dora semblait toute intriguée face au comportement suspect de Chiana. Wilfrid avait l'habitude, mais il comprit que l'attitude de chaton de la jeune femme intriguait sa jolie voisine. Elle lui posa une question, à laquelle il s'empressa de répondre sur un ton peu affirmé.

« Et bien... Ma famille vit, ou plutôt... vivait dans les Terres du Nord. Et je... suis passé par les montagnes de fer, et en allant vers la Montagne Solitaire, j'ai rencontré Chiana. On a rencontré Salahadîn là bas, et il nous a amené jusqu'ici... Vous voyez... »

Malgré toute la gentillesse de la belle Dora, il était terriblement gêné de sa situation. Il ne voulait pas importuner les hautes autorités avec ses problèmes de mémoire... En quoi cela les intéresserait ? Il n'était qu'un pauvre garçon amnésique, quelqu'un de bien banal. Et même si du sang noble coulait dans ses veines, il était bien loin d'être un noble, même s'il faisait l'effort de parler le plus respectueusement possible. Il écouta Dora tenté de la rassurer... Il avait du mal à croire qu'une princesse pouvait parler ainsi et vouloir ignorer son titre... De quoi rendre encore plus gêné le jeune homme.

« Très bien, Dora... » dit-il d'un ton amical, mais malgré tout avec un sourire forcé. « Mais vous savez, mes amis... Enfin surtout Chiana, m'appellent Stigand. Et honnêtement, je préfère ce nom là... Enfin, pour le moment... »

Soudain, il entendit un rire bien joyeux derrière lui, alors qu'il était tourné vers sa charmante voisine. En effet, Sélène éclatait de rire en voyant la part que Chiana avait prise... Et qui plus est, elle était littéralement en train d'engloutir ce plat. Visiblement elle avait une grande faim, après avoir eu une grande sieste forcée... Wilfrid donna un léger coup de coude à Chiana. Il devenait de plus en plus couleur rouge pivoine.

« Chiana, t'as promis d'être sage, alors mange gentiment s'il te plait.... »

L'ambiance se détendit brusquement, lorsque Sélène interloqua le prince nain, qui malgré son statut semblait lui aussi être un joyeux luron... Et surtout un grand buveur de bière. Un nain, un vrai, j'vous l'dis... Chiana était le centre de toutes les attentions. Il faut dire que son estomac qui devait en cacher au moins trois autres provoquait bien des rires, malgré tous les coups de coude que pouvait donner le jeune homme. Wilfrid se sentit ensuite rassurer de minute en minute dans cette ambiance chaleureuse et sans complexe, malgré quelques temps morts dans lesquelles il sentait le regard de Lou sur lui. Il tournait les yeux vers elle assez régulièrement... C'est pas qu'elle lui avait un peu taper dans l'œil (enfin, juste un peu...), mais c'était surtout le fait qu'elle l'est cernée totalement... L'attitude de cette dernière était particulière, à la fois dans sa posture et à la manière d'observer le petit couple Chiana-Wilfrid. L'amnésique se tourna vers sa jeune amie, et parvint à capter un peu son intention, entre deux bouchées...

« Après le repas, tu pourras leur montrer ton numéro de jonglerie, je suis sur que cela amusera tout le monde. » lui dit-il en souriant.

Il l'enviait. Elle n'avait pas besoin d'un rang social pour être apprécier à sa juste valeur. Elle était vraiment unique, bien qu'un peu étrange. Et elle ne se prenait que peu la tête à réfléchir à sa situation ou à un quelconque problème existentielle... Décidément sur certains points, l'innocence des enfants était bien enviable... Mais l'âge adulte la rattraperait très bientôt...

* Votre Altesse, vous m'entendez peut-être, et si vous le faites, s'il vous plait, par tous les dragons, faites ce qu'il faut pour elle, et pour qu'elle reste comme elle est après cette épreuve... Je... ne veux pas qu'elle devienne quelqu'un d'autre...* pensa-t-il, espérant que l'Impératrice avait effectivement ce pouvoir là...

Il avait pensé comme s'il priait un dieu... Il ne voulait pas perdre Chiana, enfin, il ne voulait pas qu'elle change totalement de personnalité... Et de même pour lui... Il espérait sincèrement qu'il était le même homme ou presque avant son accident. Quoi de pire que de vivre d'une certaine façon et être éduqué d'une certaine façon après avoir perdu la mémoire, et de découvrir que son ancien lui était le genre d'homme qu'il méprisait à présent... Il n'espérait jamais en arriver là, jamais...

L’ambiance était bonne…Mais plus le temps passait…et plus Dora s’attristait…Elle guettait de plus en plus la porte…comme si elle attendait quelqu’un…

Elle avait poliment répondu à Wilfried qu’elle l’appellera donc Stigand…et repris en riant :

« - Mon véritable nom est Nymphadora Bellaqua…mais je veux qu’on m’appelle Dora…alors je vous comprends… »

Son rire était comme du cristal…Mais on sentait que le cœur n’y était pas…Elle était attristée de quelque chose…Soudain n’y tenant plus, elle salua l’assemblée, et se leva, saisit son manteau et sortie…

Sélène jeta un coup d’œil vers Inwë qui haussa les épaules d’incompréhension…Lou se leva aussi…

« - Bien…j’ai décidé que nous resterons un jour de plus ici. Nous en profiterons pour d’avantage nous reposer…nous le méritons tous…Aussi je vous propose de remettre nos questions, nos soucis et autres à demain…En attendant je vous souhaite une bonne nuit… »

Et après avoir exécuté un signe de salut de la main léger et distingué, elle s’éclipsa pour monter à sa chambre qu’elle partageait avec Inwë comme à l’autre auberge…non sans avoir regardé intensément Stigand...elle ne répondit pas à son message...mais il n'était nul besoin d'elle lui parle...ses yeux en disaient assez...on verrait tout cela demain...

Chacun prit congé…Ne restaient plus que Voronwë pestant contre ce maudit nain qui était raide saoul…écroulé sur la table…et que la morale faisait qu’on ne pouvait le laisser là…Mais que compte tenu de son poids autant chercher à bouger une baril pleine…

Il le saisit par les épaules et tenta de le trainer…Salahadîn et Tsahid entreprirent de l’aider…à trois ils parvinrent à soulever le nain ivre qui chantait des chansons à boire dans son sommeil…Devant l’air désespéré de Voronwë, Salahadîn s’en fut en riant chercher une fiole contenant une potion de sa composition. Il la versa dans la bouche de Roran qui se vit forcer d’avaler un liquide sombre et peu apetissant…

Aussitôt …il sombra dans un sommeil total et pesant…

Voronwë le remercia en lui serrant amicalement la main et lui donna une accolade sur l’épaule…Les Elfes ne dormaient pas vraiment…ils méditaient beaucoup…certes ils pouvaient dormir…pour se reposer d’avantage…mais notre capitaine des gardes préférait méditer…tout comme Salahadîn…qui ne fermait pas les yeux des nuits…

Chiana bailla bruyamment…Salahadîn lui avait expliqué que la dame était fatiguée et qu’elle lui montrerai sa maman demain…Qu’elle devait être en pleine forme toutes les deux pour que ça marche…Avec une moue, Chiana accepta d’aller dormir…avec toutefois le sourire d’un enfant à qui on avait dit que le père noël allait passer durant la nuit…brave fille…

La porte s’ouvrit…laissant entrer Dora…de retour…accompagnée d’un homme que Stigand n’avait encore pas vu…enfin…récemment…L’inconnu conduisait Dora qui avait l’air accablée. Sélène se précipita vers l’homme et compte tenu de leur embrassade, Stigand ne pouvait douter de la nature de leur relation. La vampire conduisit son homme vers Stigand et les présenta :

« - Voici Wilfried de Wolfgandir…mais il préfère qu’on l’appelle Stigand… »

Vorondil lui tendis la main et lui sourit aimablement et se présenta lui-même :

« - Ca par exemple… « la » famille des Wolfgandir…les chasseurs de lycans…Heureux de vous connaître messire, j’ai connu votre père et votre frère aîné…Je suis Vorondil…fils de Terendul… »

Ca par exemple…le fils de cette enflure de Terendul…il avait l’air bon et aimable…rien à voir avec la description qu’on lui avait faite du père…Salahadîn l’avait prévenu que les fils n’avaient rien en commun avec leur père. Mais en plus…ce prince connaissait sa famille…encore un prince…et apparemment…Stigand…avait un frère aîné ?

Vorondil constata que Stigand avait un air étrange…sans doute ses propos…il prit un air navré et demanda à Wilfried :

« - Pardonnez-moi…vous aurai-je offensé ? Y a-t-il un rapport avec votre famille ? »

Il avait l’air sincère…

Wilfrid remarqua qu'au fur et à mesure que le temps s'écoulait, sa belle voisine s'attristait de plus en plus. Elle regardait de temps à autre vers la porte de l'auberge, et de plus en plus fréquemment. Elle semblait attendre quelqu'un, sans doute l'homme qui tenait son cœur. Stig voulut rendre le sourire à cette jolie demoiselle, mais il ne la connaissait guère, et ne trouverait probablement pas les mots pour lui rendre un peu de gaité. Soudain, elle se leva, pris un manteau, et sortit de l'auberge, sa patience avait atteinte son extrême limite. Suite à cela, l'Impératrice prit la parole et proposa aux membres de la Confrérie ici présent de rester à Mixtum une journée de plus. Puis elle s'éclipsa, non sans poser un regard insistant sur Wilfrid. Des fois, un regard valait un long discours. Le jeune homme comprit que Lou avait saisit le message, et qu'elle ferait ce qu'il fallait le lendemain. Rassuré de cette nouvelle, Stig baissa les yeux en souriant et la remercia dans ses pensées. Lou était vraiment une femme hors du commun, autant dans ses capacités et talents que dans sa beauté... Il fallait expliquer à Chiana qu'elle devrait attendre une journée de plus, et heureusement, l'effet de la potion de Salahadîn faisait encore effet, et elle ne se rebella pas contre la décision de l'Impératrice d'aller se coucher, bien au contraire. En temps normal, elle aurait remuée ciel et terre pour la faire changer d'avis...

Chacune des personnes présentes à ce repas se rendit vers sa chambre, les uns après les autres, le temps de finir les assiettes. Pour Chiana, malgré la potion qu'elle avait ingurgitée, ne pouvait pas laisser autant de bonne nourriture sur la table, et continuait de s'empiffrer, malgré la fatigue. Le prince nain, qui avait un peu trop bu, était étalé raide sur la table. Wilfrid voulut participer à l'effort pour le déplacer, mais il était lourd comme un baril, de bière évidemment. Mais Tsahid, Voronwë et Salahadîn faisaient l'affaire. Mais le nain s'était mis à chanter des célèbres airs que l'innocence de la maître du jeu de ce forum m'empêche de rédiger. Heureusement, Salahadîn avait encore une potion dont il avait le secret, et la fit boire au pauvre nain saoul. Wilfrid se douta de l'effet qu'aurait le breuvage, et son intuition se confirma l'instant d'après... Chiana monta à son tour vers sa chambre, en bailla bruyamment. Les pauvres personnes à l'étage qui devaient être déjà endormies n'ont pu qu'entendre le bâillement de la vampire.

Quelques secondes plus tard, Dora revint en compagnie d'un homme, et si Sélène ne lui avait pas sautée dessus et s'ils ne s'étaient pas embrassés si amoureusement, Wilfrid aurait pu croire qu'il s'agissait de l'homme de la princesse des fées. La vampire le présente au nouvel arrivant, qui faisait probablement partie de la Confrérie. Quel ne fut pas le choc de Wilfrid en apprenant qu'il avait un des fils de Terendul sous les yeux. Comme Salahadîn avait pu lui dire auparavant, il y avait un net décalage entre l'image du père et celui des enfants. Le jeune homme sonda le prince. Il semblait être un honnête homme et un brave, et non pas une personne avide de pouvoir et cupide comme son père. La perplexité de Stig se lisait aussitôt sur son visage, et cela n'échappa pas à Vorondil. Il avait connu des Wolfgandir... Et Wilfrid apprit sur le coup qu'il avait eut un frère ainé... Une vive douleur empoigna son cœur. Le prince ne semblait pas au courant de la tragédie qui avait touché la famille de l'amnésique.

« Je vous prie de m'excuser... » répondit Wilfrid, en baissant la tête, le regard vague. « C'est que... voyez-vous... J'ai appris récemment que ma famille avait été massacrée par des lycans... »

Il marqua une pause et soupira. Il n'allait pas importuner le prince de son amnésie.

« Et puis, votre père m'est pas totalement inconnu. Il semblerait qu'il soit lié à un grand nombre de malheurs, sur ces terres et dans d'autres... Mais si cela ne vous dérange pas, j'aimerai remettre cette conversation à demain... Votre présence ne m'importune pas, loin de là. Mais j'ai voyagé une bonne partie de la journée et je suis exténué... Et Salahadîn sera mieux à même de présenter la situation que moi. »

Quelle ironie, la Confrérie semblait mieux le connaître que lui-même... Cela affectait beaucoup le jeune homme. Il avait si peur d'être un étranger pour lui-même. Et être connu malgré lui était une sensation horrifiante, surtout qu'il n'avait pas d'identité propre... Quoi de plus terrible que de vivre sans même savoir quelle est notre place dans ce monde ?

Le geste amical de Vorondil toucha quelque peu l'homme du nord, bien que sa peine ai été trop grande. Quoi de plus terrible que de ne plus avoir de famille encore en vie à la fois dans ce monde et dans sa mémoire ? C'était comme si les dragons l'avaient fait naître, au pied de cette maudite falaise, mais qu'au final, il n'est aucun lien de parenté avec qui que ce soit. Il était terriblement seul, et ce sur tous les plans. Vivre sans l'amour d'une famille était quelque chose terrible. Malgré toute la bonté qu'avait eu Melni la naine et les autres nains du village, ils n'avaient pas remplacer sa famille dans son âme. Sa famille semblait être appréciée, mais elle ne restait pas moins étrangère à Wilfrid. Sélène vint à son tour réconforter le jeune garçon, mais cette gentillesse n'était que pitié pour lui. Il se sentit comme un enfant à qui était arrivé un malheur et qu'on dorlotait en espérant qu'il aille mieux. Néanmoins, cette chaleur humaine (même si on pouvait pas parler de chaleur physiquement parlant avec la vampire, malgré la sensualité qu'elle dégageait) le soulagea un peu dans sa douleur. Et les quelques mots de la jeune femme l'intriguerait, d'autant plus qu'elle lui parla l'instant d'après par télépathie. Décidément, l'Impératrice était entouré de gens à la fois simples et extraordinaires, sans prétention mais plein de tolérance... Tout le monde avait rejoint sa chambre, et Wilfrid fit de même. Demain allait être une journée pas comme les autres.

C'est Salahadîn qui se chargea de la tâche de lever le jeune amnésique. Il fut surpris de voir que le soleil s'était déjà levé, et si le semi-elfe n'était point venu, il aurait pu dormir jusqu'à ce que l'astre ai atteint le zénith... Une vraie marmotte. Son sommeil avait été lourd et pesant, sans rêve, sans interrogation. La journée qui s'annonçait sonnait comme une lueur d'espérance et de révélations. L'Impératrice en personne, ainsi que Sélène, allait s'occuper de la vampirette et de l'amnésique. Après un court petit déjeuner, mais copieux et revitalisant, l'auberge se vida de la quasi totalité de ses occupants. Chiana ne tenait plus en place... Elle allait revoir sa mère, elle en était plus que convaincu. Wilfrid quand à lui ne dégageait aucun excès de bonne humeur. Il était bien plus sceptique quant à l'idée de recouvrer la mémoire ce jour-ci, malgré les promesses d'aide de Lou et de Sélène. Et puis, le cas de Chiana était bien plus important. Elle pouvait tuer si facilement quand elle se transformait... Elle était si forte, si monstrueuse... Elle passait en priorité. Stigand s'étonna d'apprendre que même le reste de la Confrérie soit absent. Il aurait souhaité que Salahadîn soit présent, vu qu'il avait lui aussi la capacité de contenir le pouvoir de Chiana.

Lou était assise sur un fauteuil dans la même posture désinvolte que la veille. Malgré une coiffure visiblement faite à la va-vite, l'Impératrice était toujours d'une beauté sans pareille. Elle savait se coiffer avec goût... Chacune d'une personne présente avait un fauteuil à sa disposition... A peine la conversation s'engagea entre la jeune femme aux yeux azurs et celle aux yeux de chat que Wilfrid sentit que la situation allait vite devenir explosive. La petite voulait voir sa mère, et ne souhaitait pas à avoir à se souvenir de ce bien triste jour qui la hantait. Lou utilisa un sort qui scotcha Chiana sur son fauteuil. Elle indiqua également au seul homme présent au milieu de ces jolies femmes qu'il passerait plus tard...

« Il va de soi que le cas de Chiana est bien plus important que le mien. Faites votre possible, s'il vous plait. » ajouta-t-il aux propos de l'Impératrice, d'un ton rassuré.

Soudain, l'Impératrice se dressa, elle semblait avoir aperçu quelque chose. Le collier de Chiana l'intrigua tellement qu'elle utilisa la magie pour le faire venir dans sa douce main. La surprise de la jeune femme se lisait sur son visage. Elle semblait fascinée par ce collier...

« Votre Altesse, parmi toutes les cordes sensibles de Chiana, vous venez de toucher au vif la plus importante à ses yeux... » dit-il, stupéfait par ce tour de magie, et à la fois horrifié par la réaction de Chiana qui ne tarda pas se manifester.

Elle entama sa transformation presque aussitôt que le collier lui fut retirer... Elle fulminait d'une rage que Wilfrid n'avait alors jamais pu observer... Elle dégageait bien plus de puissance que lors des deux précédentes métamorphoses. Wilfrid était si inquiet qu'il voulut intervenir, mais la voix de la raison (qui étrangement sonnait comme celle de Salahadîn) vint le stopper. Il se retenait comme il pouvait. Il recula et rejoignit Sélène. Lou était presque amusée d'assister à la transformation de la jeune fille, et cela sembla presque sadique aux yeux de Wilfrid... Mais l'Impératrice avait l'air confiante et sur d'elle. Elle n'était pas une amatrice, sa démonstration de puissance en ayant plaquer Chiana au fauteuil plus tôt malgré la force surhumaine de la jeune en était la preuve. Le jeune homme rassura sa conscience comme il le pouvait. Il voulait, non... Il devait avoir confiance en l'Impératrice...

« Était-ce là la seule solution Votre Altesse ? » demanda-t-il, tandis que Chiana hurlait sa rage. « J'aurai aimé que sa se passe en douceur... Peut-être devrait-on demander à Salahadîn de nous rejoindre, vous ne croyez pas ? Ses talents nous seraient utiles... Mais je vous accorde ma totale confiance, Impératrice Lou... »

Il soupira profondément, il allait assister à quelque chose de peu banal. Un privilège, ou un risque énorme ? Il le saurait bien assez tôt... Il était très inquiet, car il n'avait aucune idée de l'étendu des pouvoirs des deux femmes. C'était bien plus impressionnant qu'un crêpage de chignons...

« Vous n'avez pas le droit d'échouer, elle n'a aucune pitié une fois totalement métamorphoser... La moindre erreur vous coutera cher... Faites attention à vous, altesse... »